Linux et non Windows ? La migration des 285 PC de la municipalité turque d’Eyupsultan n’est pas une nouveauté. Les cas de la municipalité de Munich et de l’État fédéré de Basse Saxe en Allemagne l’illustrent. La municipalité turque rapporte que l’opération entamée en 2015 s’est bien passée, ce, même s’il reste quelques goulots d’étranglement. En effet, d’une initiative à l’autre, des points communs émergent : hésitations, rétropédalages de Linux à Windows. Quelles raisons expliquent ces échecs ? Supériorité des solutions Windows ? Lobbying pro Windows ?
L'histoire commence avec l'élection d'un nouveau maire (en 2014) qui a administré une étude sur la migration vers Linux et d'autres logiciels libres afin de réduire les coûts de la municipalité. Le département informatique de la municipalité d'Eyupsultan a préparé l'étude et s'est rendu compte que ce serait une bonne décision. Le choix des équipes IT s’est finalement porté sur Pardus Linux.
Pardus Linux est une distribution Linux basée sur Debian et est adaptée aux utilisateurs turcs. Elle est officiellement développée par "Ulakbim", qui est un institut de recherche gouvernemental, filiale du Conseil de la recherche scientifique et technologique de Turquie (TÜBİTAK). Pardus Linux est en développement depuis 2005, et se décline en versions GNOME et Xfce qui peuvent être installées sur les machines des utilisateurs, comme toute autre distribution Linux. La dernière version de Pardus est basée sur Debian 11, et peut être téléchargée sur le site officiel.
La distribution contient également des logiciels libres qui conviennent à une utilisation quotidienne, comme LibreOffice pour l'édition de documents, VLC pour la lecture de fichiers multimédias et GIMP pour le dessin ou le traitement d'images. Tout paquet open source disponible dans Debian est également disponible dans Pardus pour être installé.
La municipalité d'Eyupsultan a choisi d'utiliser Pardus Linux par défaut dans ce projet de migration pour des raisons évidentes ; principalement, le support de la localisation pour la langue turque et aussi le fait d'être une distribution Linux officielle développée par une agence gouvernementale de la République de Turquie.
En Turquie, le coût d’une licence Windows 10 Pro est de 237 $ et celui d’une licence Microsoft Office de 536 $. Hüseyin Güç, administrateur système à la municipalité d'Eyupsultan et également chef du projet de migration rapporte que l’opération a permis de réaliser des économies d’un million de dollars sur les coûts des licences Windows pour le système d’exploitation et la suite bureautique Office. Seulement, c’est sur l’aspect frais de formation du personnel que la municipalité ne développe pas. Cet aspect avait pourtant été pointé du doigt comme l’une des raisons de l’abandon de Linux pour Windows par la ville de Munich.
D'après l'étude initiale réalisée en 2003, l'adoption de Linux aurait engendré des frais s'élevant à 37,5 millions d'euros frais de formation inclus contre 35 millions d'euros pour couvrir les frais des licences de Windows et d'Office. La solution propriétaire de Microsoft aurait donc coûté moins cher que l’alternative open source. Après avoir mené une seconde étude en 2012, la ville a annoncé avoir économisé 11,6 millions d’euros : 5 millions d’euros en coût de mise à niveau du matériel requis pour Windows 7, 4,2 millions d’euros en achat de licences Windows et 2,6 millions d’euros en achat de licence Office pour l’ensemble de son parc de 15 000 ordinateurs. En 10 ans Munich a dépensé près de 22 millions d’euros en formation.
Le plan de passage de 25 000 PC des administrations du Schleswig-Holstein, un État fédéré allemand, à Linux présente des caractéristiques similaires. Il s’inscrit dans l’objectif global de l’État de se débarrasser des solutions propriétaires au profit d’alternatives open source. Le plan prévoit un passage complet desdits postes de travail à LibreOffice à l’horizon 2026.
« Nous testons LibreOffice dans notre département informatique depuis deux ans. Et notre retour d'expérience se veut clair : ça fonctionne. Cela s'applique également, par exemple, à l'édition de documents Microsoft Word avec des commentaires. L'interface entre LibreOffice et notre logiciel pour les fichiers électroniques fonctionne également de manière stable depuis six mois. Nous avons d'abord dû la faire développer par le fabricant du logiciel e-file. D'autres autorités testent actuellement l'utilisation de LibreOffice, mais il reste encore quelques obstacles à franchir avant un déploiement à grande échelle dans l'administration publique », explique le ministre en charge des questions sur le numérique quant à ce qui est des avancées.
« Le principal problème avec cette initiative a été la non-prise en compte des employés. Nous comptons faire mieux. Nous prévoyons de longues phases de transition marquées par une utilisation parallèle et une démonstration à chaque phase de ce que l’approche Linux marche » , ajoute le ministre en charge des questions sur le numérique répond que l’utilisation en parallèle s’avère intéressante dans certains cas.
Les problèmes de compatibilité matérielle font partie des raisons susceptibles d’expliquer les échecs des initiatives visant à remplacer Windows par Linux. C’est en tout cas le motif qu’avaient évoqués les élus qui avaient soutenu le projet d’abandon de Linux au profit de Windows 10 dans le cas de la municipalité de Munich. C’est aussi celui que la municipalité turque d’Eyupsultan met en avant pour des périphériques comme les imprimantes et les scanners de codes barre. La situation est cependant susceptible de s’inverser si Linux bénéficie de plus de vente liée, atout dont Windows dispose.
Source : Hüseyin Güç
Et vous ?
Qu’est-ce qui explique les hésitations et les échecs qui marquent les projets de passage de Windows à Linux ? La supériorité des solutions Windows en comparaison à Linux ? Le lobbying ? La résistance au changement ?
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Dans le cadre de sa migration vers Linux Pardus
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Le , par Patrick Ruiz
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