Le ministère russe du développement numérique a annoncé son intention de créer une communauté de développement Linux indépendante à la suite du retrait des contributeurs russes du développement du noyau Linux.
La proposition du ministère, qui vise à encourager la collaboration avec les pays disposés à travailler avec la Russie, fait suite à la décision controversée des responsables de Linux de retirer plusieurs développeurs russes de la liste. Cette décision, motivée par des exigences de conformité dans un contexte de sanctions accrues, a suscité des inquiétudes quant à la pérennité des contributions technologiques de la Russie à Linux et à l'impact plus large sur les communautés de logiciels libres.
Le représentant du ministère a qualifié le retrait des contributeurs russes de discriminatoire, soulignant que les développeurs russes jouent un rôle essentiel dans les projets basés sur Linux utilisés au niveau national et international. La réponse du ministère consiste à encourager les alliances avec des nations susceptibles de soutenir les projets russes de logiciels libres. Cette initiative alternative pourrait déboucher sur une fork de Linux - une version distincte de Linux, dirigée par la Russie, qui s'adapterait aux exigences technologiques de la Russie tout en visant l'autonomie par rapport à la gouvernance internationale en matière de logiciels libres.
L'annonce ne précise pas quels pays pourraient participer à l'écosystème proposé. La Chine a néanmoins été mentionnée comme un allié potentiel.
C’est dans un contexte similaire que la Chine a décidé de lancer Gitee – une alternative à GitHub
Gitee compte plus d’une dizaine d’années d’existence en Chine. Une sortie d’un responsable de Huawei en lien avec ce développement en dit long sur l’objectif : « Si la Chine ne dispose pas de sa propre communauté open source pour maintenir et gérer les projets, notre industrie nationale du logiciel sera très vulnérable à des facteurs incontrôlables. » L’intervention de Wang Chenglu pointait du doigt les sanctions à répétition des autorités américaines.
GitHub est, il ne faut pas l’oublier, une plateforme soumise aux lois américaines. En vertu de celle qui régit les exportations de technologies, la plateforme ne peut être utilisée pour le développement d’armes nucléaires, biologiques ou chimiques ; de missiles longue portée ou de véhicules aériens téléguidés. C’est le type de raisons mises en avant par les USA pour ordonner le verrouillage des dépôts des développeurs issus de pays dits ennemis.
L’officialisation de Gitee a un bon côté : elle vient créer de la concurrence dans un secteur des services en ligne dominé par les plateformes américaines. Elle n’échappe cependant pas à la dualité, la Chine étant connue comme le pays où la fiction Big Brother de 1984 tend à devenir réalité. Avec ses plus de 10 millions de dépôts, les autorités chinoises positionnent déjà Gitee comme deuxième plus grosse plateforme d’hébergement et de gestion de projets logiciels open source.
Linus Torvalds a réagi sur la question de la mise à l’écart des mainteneurs russes en invoquant le respect des sanctions internationales
Pour rappeler les faits, lors de la publication du correctif du noyau Linux 6.12-rc4 du 20 octobre dernier, plusieurs mainteneurs de pilotes du noyau Linux ont été retirés, probablement en raison de leur association avec la Russie. Si la raison officielle cite la suppression de certaines entrées « en raison de diverses exigences de conformité », les analystes estiment que la cause probable de ces retraits du fichier MAINTAINERS officiel, qui reconnaît tous les mainteneurs de pilotes et de sous-systèmes, serait leurs liens avec la Russie. Cette décision pourrait donc être liée aux sanctions imposées à la Russie dans le cadre de la guerre en Ukraine.
« Ok, il y a beaucoup de trolls russes dans la nature. La raison pour laquelle le changement a été effectué est tout à fait claire, il ne sera pas annulé, et l'utilisation de plusieurs comptes anonymes aléatoires pour essayer de le faire passer par des fermes de trolls russes ne changera rien.
Et pour information, pour les spectateurs innocents qui ne sont pas des comptes de fermes de trolls, les « diverses exigences de conformité » ne sont pas seulement une affaire américaine. Si vous n'avez pas encore entendu parler des sanctions russes, vous devriez essayer de lire les nouvelles un jour. Et par « nouvelles », je n'entends pas le spam sponsorisé par l'État russe.
Pour ce qui est de m'envoyer un correctif, je vous prie d'utiliser la bouillie que vous appelez cerveau. Je suis Finlandais. Vous pensiez que je soutiendrais l'agression russe ? Apparemment, il ne s'agit pas seulement d'un manque d'informations réelles, mais aussi d'un manque de connaissances historiques », a-t-il lancé en réponse aux multiples réactions concernant ce changement.
Source : RBC
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L’open source doit-il souffrir des politiques des pays ? Est-il possible qu’il en soit autrement ?
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