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Guide d'installation et de configuration de Linux


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II. GNU, Linux et les logiciels libres

Vous entendrez souvent parler de la licence « GPL », du projet « GNU », de la « Free Software Foundation » et des logiciels libres dans le monde de Linux. Pour bien comprendre ce que sont les logiciels libres et la Free Software Foundation, et ce que signifie la licence GPL, il est nécessaire d'en faire une brève présentation.

II-A. Les logiciels libres et la Free Software Foundation

La Free Software Foundation est une organisation dont le but est de développer des logiciels libres. Le terme de « libre » signifie clairement que chacun peut faire ce qu'il veut du logiciel, y compris le modifier. La vente n'est absolument pas interdite, et il faut donc faire la distinction entre libre et gratuit. Cela étant dit, les logiciels libres sont souvent de facto gratuits, car ils sont librement redistribuables par quiconque en possède une copie.

La liberté de modifier les logiciels libres implique naturellement que leur code source, c'est-à-dire le texte de leur programme tel qu'il a été saisi par ses auteurs, soit librement accessible et modifiable. Les logiciels libres sont donc qualifiés de logiciels « Open Source », ce qui signifie en anglais que les sources du programme sont disponibles. Attention cependant, tous les logiciels Open Source ne sont pas forcément libres, car il n'est pas toujours possible de modifier ce code source et de le redistribuer librement (éventuellement gratuitement). Ainsi, nombre d'éditeurs de logiciels propriétaires publient leur code source sans pour autant donner de droits supplémentaires à ceux qui les lisent. Certains d'entre eux jouent d'ailleurs explicitement sur cette confusion. De plus, la plupart des journalistes anglo-saxons font cette confusion et, de ce fait, occultent tous les avantages des logiciels libres. Vous trouverez de plus amples informations sur la notion de code source dans le Chapitre 7.

II-B. Droits d'auteurs et la licence GPL

Il faut bien comprendre que le fait de diffuser un logiciel sous une licence libre ne prive absolument pas son auteur de ses droits. Il en reste l'auteur et, en tant que tel, conserve les droits d'auteurs sur son travail. Il ne fait que concéder la liberté d'exploiter ce travail aux autres. C'est en cela que les logiciels libres se démarquent du domaine public, dont les logiciels ne sont plus soumis à aucun droit.

Afin de protéger les logiciels libres et leurs auteurs, la Free Software Foundation a rédigé la licence GPL (abréviation de l'anglais « General Public License »). Cette licence stipule que le logiciel libre peut être redistribué, utilisé, modifié librement, pourvu que celui qui en bénéficie accorde les mêmes droits à ceux à qui il fournit les copies du logiciel, qu'il l'ait modifié ou non. En d'autres termes, elle garantit que la liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres.

Cette licence empêche donc l'aliénation du logiciel et sa transformation en logiciel propriétaire, de quelque manière que ce soit. Cela implique que tout logiciel libre sous licence GPL modifié par une autre personne que son auteur reste libre, et le restera à jamais. Ainsi, il est impossible qu'une société commerciale puisse un jour s'approprier un logiciel libre, même si elle l'améliore. Si vous désirez lire la licence GPL, vous pouvez en trouver une copie dans le fichier /usr/src/linux/COPYING une fois que vous aurez installé Linux.

La FSF a également rédigé d'autres licences plus adaptées aux bibliothèques de programmes et aux documentations libres. Ainsi, la licence LGPL (« Lesser General Public License ») permet d'utiliser les bibliothèques de programmes dans des programmes propriétaires, et la licence FDL (« Free Documentation License ») permet de diffuser des documentations libres. À titre d'exemple, ce guide est distribué sous licence FDL, dont vous trouverez une traduction française en annexe.

Précisons que la licence GPL n'est pas la seule licence permettant de distribuer des logiciels libres. Il existe d'autres licences, dont les termes sont à peu près similaires. Par exemple, la licence BSD (un autre système Unix libre) exige également la distribution des sources, mais permet l'appropriation des sources par des sociétés commerciales. De même, la licence X, sous laquelle est diffusé l'environnement graphique X11 qu'utilise Linux, est une licence libre. Quelques outils fournis avec Linux sont distribués avec d'autres licences plus rares.

II-C. Le projet GNU et Linux

La licence GPL a été écrite initialement pour le projet GNU de la Free Software Foundation, dont le but est de réaliser un système Unix libre et indépendant des Unix commerciaux. Précisons ici que le terme « Unix » caractérise un ensemble de systèmes d'exploitation, qui disposent tous à peu près des mêmes fonctionnalités et proposent d'y accéder de la même manière.

Le projet GNU est toujours en cours, puisque la Free Software Foundation a déjà écrit la plupart des utilitaires Unix, mais que le cœur du système (ce que l'on appelle le noyau) est toujours en cours de réalisation. Pour information, ce noyau se nomme « Hurd ».

Cependant, d'autres noyaux sont disponibles, avec lesquels les commandes GNU peuvent être utilisées. Parmi ces noyaux, il existe bien entendu Linux, qui a été écrit par le Finlandais Linus Torvalds lorsqu'il était étudiant, et amélioré par des programmeurs du monde entier sur Internet. Linux est un noyau parmi tant d'autres, à ceci près qu'il est, lui aussi, distribué sous la licence GPL, bien que n'ayant rien avoir avec la Free Software Foundation.

Cela signifie qu'il serait en fait plus exact de parler du système « GNU/Linux » que de « Linux » tout court. Sous cette dénomination, il est clair que ce système est constitué des outils GNU fonctionnant sur le noyau Linux. C'est donc un ensemble de logiciels libres provenant de plusieurs sources distinctes. Cependant, il est très courant d'entendre parler de « Linux » tout court, par abus de langage et par souci de simplicité. Bien entendu, cette dénomination est proscrite sur les sites Internet de la Free Software Foundation, qui devient très susceptible à ce sujet.

Pour information, le terme « GNU » est l'abréviation de l'anglais « GNU's Not Unix ». Cette curieuse phrase rappelle que le projet GNU est de réaliser un système Unix différent des autres. Vous remarquerez que cette définition est récursive, c'est-à-dire qu'elle utilise le mot « GNU » elle-même. Cela doit être attribué au goût des développeurs de la Free Software Foundation pour ce genre de définition infiniment récursive. Vous ne saurez sans doute jamais les raisons qui les ont poussés à choisir la lettre 'G' dans leur définition. Cela étant, « GNU » se prononce « gnou » en anglais, et vous trouverez donc souvent la représentation d'un gnou sur les sites Internet de GNU.

II-D. Avantages et inconvénients des logiciels libres

Les logiciels libres disposent d'avantages indéniables par rapport aux logiciels « propriétaires » ou « fermés ». Je vais tenter de donner ici une liste non exhaustive de ces avantages :

  • Les programmes distribués sous licence libre ont souvent été écrits par des passionnés du domaine applicatif auquel ils appartiennent. Les logiciels libres disposent donc souvent des dernières fonctionnalités à la mode et sont donc généralement extrêmement compétitifs sur ce plan.
  • Du fait du grand nombre possible d'intervenants sur les sources des logiciels libres, un grand nombre de possibilités techniques peuvent être explorées, et c'est souvent la meilleure qui est sélectionnée. C'est une forme de sélection naturelle de la meilleure solution. Ainsi, sur le long terme, les logiciels libres sont les plus efficaces en terme de performances.
  • Toujours du fait du grand nombre d'intervenants, et surtout de par la possibilité de consulter et de modifier librement le code source, le cycle de détection/identification/correction des bogues est très court. Les logiciels libres sont donc parmi les plus fiables qui se font. On peut considérer qu'un logiciel libre utilisé par un grand nombre de personnes est virtuellement « sans bogue » connu, puisque si tel était le cas il serait immédiatement corrigé.
  • La possibilité de repartir d'une base de source existante permet de réaliser des développements beaucoup plus rapidement que dans un modèle fermé. Les logiciels libres sont donc également ceux qui se développent le plus rapidement à coût fixe, et sont certainement les plus rentables en terme de coût global pour la collectivité.
  • Afin de garantir l'interopérabilité entre les différents intervenants du monde du logiciel libre, chacun s'évertue à respecter les standards. Les logiciels libres sont donc les plus ouverts, non seulement en terme de code source, mais également au niveau des formats de fichiers et des protocoles de communication. Cela garantit une interopérabilité optimale et l'absence de mauvaise surprise.
  • Professionnellement parlant, la disponibilité du code source fournit une garantie de fonctionnement que l'on ne peut pas retrouver ailleurs. En cas de problème, il est toujours possible de s'en sortir, éventuellement en recourant à des compétences externes pour adapter le logiciel à ses propres besoins.
  • Enfin, la disponibilité du code source garantit une pérennité absolue du logiciel, ce qu'aucune société commerciale vendant des logiciels propriétaires ne peut ou ne veut faire.

Pour être honnête, il faut admettre que les logiciels libres ont également des inconvénients. La liste suivante en présente quelques-uns :

  • La diversité des logiciels libres a également un revers. L'utilisateur peut avoir à choisir entre plusieurs logiciels, ce qui ne simplifie pas forcément l'apprentissage ou la communication entre les différents utilisateurs de logiciels libres. Prenez par exemple ce guide : il fait la présentation de l'installation de trois distributions Linux, qu'il a fallu choisir parmi les centaines de distributions existantes… De plus, ce n'est pas le seul document traitant du sujet de l'installation et de la configuration de Linux (mais c'est sans doute le meilleur, n'est-ce pas ?). Cela ne simplifie pas les choses pour l'utilisateur.
  • La diversité des bibliothèques et des outils, ainsi que le nombre d'applications susceptibles de communiquer entre elles, implique une complexité accrue dans le travail d'intégration de tous ces logiciels. Les distributions s'assurent que les logiciels qu'elles fournissent fonctionnent bien ensemble, mais la redondance existe malgré tout et a un coût non négligeable finalement, aussi bien pour les distributions que les programmeurs et les éditeurs de logiciels. La description de l'installation de trois distributions dans ce document a également un coût pour son auteur (pfff !). Enfin, même l'utilisation simultanée de plusieurs logiciels peut amener à charger en mémoire de nombreuses bibliothèques ayant pourtant la même fonction, alourdissant le système inutilement.
  • Certaines fonctions des logiciels ne seront pas forcément implémentées, si ses auteurs n'y voient pas d'intérêt. Si le logiciel est développé par une seule personne ou une petite équipe, ils peuvent ne pas en avoir les moyens financiers ou temporels. Toutefois, si un nombre suffisant d'utilisateurs la réclament, il est probable qu'une personne ayant les compétences nécessaires pour ajouter la fonctionnalité se manifeste. Mais il est également possible qu'un autre projet soit démarré, ajoutant encore une fois un élément à la complexité de l'écosystème des logiciels libres. Il n'est donc pas rare d'avoir plusieurs logiciels réalisant la même chose, mais qu'aucun ne soit complet !
  • Du fait que les logiciels libres sont justement développés par des passionnés ou par des sociétés qui ne peuvent pas en tirer un bénéfice direct, certains domaines ne sont pas couverts par les logiciels libres. Ainsi, vous ne trouverez pas toujours une alternative libre à un logiciel propriétaire, soit parce que le sujet n'intéresse personne, soit parce que les coûts de développement dépassent les capacités des organisations de développeurs de logiciels libres.
  • Plus spécifiquement, le marché monopolistique de Windows est beaucoup plus grand que celui de Linux. De ce fait, même les éditeurs de logiciels propriétaires rechignent à faire l'effort du portage de leurs logiciels pour Unix/Linux. Ainsi, la logithèque pour les systèmes libres s'en trouve d'autant plus réduite. Cela est particulièrement vrai pour les jeux et les logiciels professionnels, et malheureusement également pour les pilotes de périphériques de certains constructeurs de matériel.
  • Quand bien même les éditeurs de logiciels voudraient publier leurs logiciels sous licence libre, ils n'en ont pas toujours le droit, en raison d'accords de licence avec des tiers ou de brevets qu'ils utilisent, et parfois même en raison de la réglementation locale de certains pays (comme la France, depuis la loi DADVSI, pour tous les logiciels de lecture de films protégés par exemple). De même, les vendeurs de matériel ne peuvent pas toujours fournir de pilotes libres, ni même d'informations ou de spécifications sur le matériel.

Hélas, ces inconvénients sont parfois incontournables, car inhérents à la nature même des logiciels libres. Des reproches injustifiés sont parfois réalisés envers les auteurs des logiciels libres, alors qu'ils ne sont pas en mesure d'éviter ces problèmes. L'utilisateur doit donc également se faire une raison : après tout, il reçoit déjà beaucoup de la communauté des logiciels libres.

Mais, et c'est là l'essentiel, l'aspect le plus important des logiciels libres est le fait qu'ils garantissent la liberté des utilisateurs par rapport aux éditeurs de logiciels. Le respect des standards, l'ouverture des formats de documents et des protocoles de communication garantissent une interopérabilité absolue, qui permet ainsi à chacun de rester libre de ses choix pour sa solution informatique. Il n'est que trop courant de voir les éditeurs de logiciels enfermer leurs clients dans une dépendance vis-à-vis d'eux, simplement en leur faisant utiliser des produits fermés et inutilisables sans leur concours. Le pire est sans doute que cette dépendance est transitive (le fait pour un auteur d'utiliser un produit implique que ses lecteurs le possèdent également), durable (on ne peut faire de mise à jour que chez le même éditeur de logiciel), voire imposée par la loi (interdiction en France d'analyser les formats de documents protégés/chiffrés depuis la loi DADVSI par exemple).

II-E. La motivation des auteurs et le financement des logiciels libres

Bien que cela ne se situe pas au même niveau philosophique, la question de la motivation des auteurs de logiciel libres et, pour les entreprises, de leur financement, se pose également de manière récurrente. Il n'est en effet pas évident, en première analyse, de déterminer les raisons qui poussent un auteur ou une entreprise à rendre ainsi public son savoir-faire, au risque de se le faire tout simplement voler.

Pour ce qui est des auteurs bénévoles, la motivation provient généralement de l'amusement qu'ils ont à développer ces logiciels et à les partager avec la communauté du logiciel libre. Cette communauté, constituée de l'ensemble des auteurs et des utilisateurs des logiciels libres, leur apporte en général la reconnaissance, des rapports de bogues ou des idées d'amélioration de leur logiciel, des conseils ou même de l'aide sur des sujets qu'ils ne maîtrisent pas (traduction, nouvelles fonctionnalités, etc.).

De plus, en s'intégrant à la communauté du logiciel libre, les programmeurs amateurs peuvent également récupérer des bibliothèques de programmes ou des morceaux complets d'autres programmes, et ainsi voir leur logiciel progresser plus vite. Certains peuvent même se distinguer des autres et se voir approcher par une entreprise pour un emploi sur le logiciel qui leur servait à l'origine de passe-temps ! Il est toujours plus agréable de travailler sur quelque chose qui nous plaît…

Les sociétés quant à elles peuvent financer le développement des logiciels libres qu'elles éditent ou auxquels elles contribuent de plusieurs manières. Quelques sociétés vivent de manière dérivée des logiciels libres qu'elles développent (par vente de produits dérivés, de contrat de support, ou de services complémentaires). C'est notamment le cas des sociétés qui éditent des distributions Linux et des sociétés de service en logiciel libre. D'autres sociétés proposent une double licence, constituée d'une licence libre telle que la GPL pour bénéficier des avantages des logiciels libres, et d'une licence propriétaire, permettant d'obtenir une rémunération de la part des clients qui ne veulent pas se plier aux exigences de la GPL (obligation de redistribution des sources en particulier).

Enfin, de nombreuses sociétés contribuent à des logiciels libres tout simplement parce qu'elles en ont besoin. Il est en effet souvent préférable d'adapter un logiciel libre qui satisfait ses besoins à 80 % et de développer les 20 % restants, quitte à redistribuer les modifications et améliorations qui y sont apportées, que de redévelopper l'intégralité d'un logiciel équivalent ou d'en financer le développement par une société tiers. Le coût total de développement d'une solution complètement propriétaire est en effet généralement beaucoup plus élevé. On voit bien que dans ce cas, les développeurs de logiciels libres sont avant tout leurs propres utilisateurs…

Cela dit, il faut être clair sur ce sujet : le logiciel libre rapporte moins que le logiciel propriétaire, tout simplement parce qu'il n'est pas question de monopole ici et qu'on ne peut pas pressurer le client aussi facilement qu'avec une offre logicielle fermée.

Comme on le voit, le logiciel libre est très loin d'être l'apanage de quelques fanatiques, et les mauvaises langues qui considèrent ce modèle économique comme du communisme n'ont assurément rien compris. Bien au contraire, il s'agit là de capitaliser les développements et de réduire les coûts, deux objectifs fondamentaux dans une économie de marché et très souvent mal appliqués à l'informatique ! Quant à ceux qui prétendent que les logiciels libres constituent une forme de dumping dans le domaine informatique, ils devraient plutôt analyser la pertinence de ce modèle économique et voir si, finalement, ce n'est pas tout simplement un modèle plus rentable sur le long terme que le modèle propriétaire. Il suffit de considérer le temps consacré, et le coût probablement pharaonique, du développement de Windows Vista, pour constater que le rapport qualité/prix est loin d'être reluisant, même par rapport son aîné Windows XP…


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